L’appel de Lady Yogaga et de Monsieur Taï Chi


Je placarde mes deux yeux vaseux derrière des lunettes miroir. Le but n’est pas de dissimuler mes globes oculaires désaxés qui ont tendance à flotter dans les bouées des cernes. Ce n’est pas une façon détournée de camoufler mon regard douteux qui divague parfois dans des creux poreux. Je préfère d’emblée voguer en orbite loin du mouvement incessant des océans indécents. Je cherche plutôt à pénétrer dans le beurre de l’anonymat profond de l'effacement. Vivre le mégot trip de l’observateur ambiant. Devenir un incinérateur ambulant qui s’envole dans la fumée de l’anonymat rampant. M’écraser dans l’art de l’espionnage croulant.

Je m’installe donc à deux reprises comme un imposteur avec mes lunettes d’approche à proximité des disciplines récurrentes que sont le yoga et le Taï chi. Mes sources m’ont informé que ces activités doublement hebdomadaires rassemblent au moins dix adeptes à chacune des séances. Mon manque de souplesse physique et mon degré peu élevé d’élasticité mental ne me permettent pas de pratiquer ces nobles activités. Mon esprit curieux à moitié me pousse quand même à regarder discrètement tous ces gestes qui intriguent de nombreux badauds médusés. Mais quoi qu'en disent ces regards ignorants, tous ces mouvements lents semblent propulser les participants dans un autre espace temps. Il faut savoir que mon regard extérieur ne malcommode nullement les abonnés abandonnés à ces pratiques millénaires. L’état de plénitude de ces gens est frappant. Ils en arrivent à oublier les marteaux piqueurs de l’agitation urbaine galvanisée par l'étourdissement. Je me suis moi-même surpris à fermer les volets de mes paupières et à plonger dans mes retranchements incendiaires. À ouvrir le robinet d’un doux baume sur mes petits bobos inventés d’occidentaux. Il faut entendre la mélodie des voix calmes et rassurantes de ces éleveurs de conscience. C’est comme une légère brise sur notre peau. C’est le chant des oiseaux ou des feuilles qui sifflotent dans le vent. C’est comme si le temps arrêtait de battre sa course contre la montre, autour des petits poumons d'un quartier aiguillonné par le béton. Ces activités sont une merveilleuse façon d’occuper les minis infinis parcs de notre harmonie nature…
Sébastien Blais

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